Lancement du livre: Cross-Border Cosmopolitans

Cosmopolites transfrontaliers : Discussion sur le colonialisme, la race et la sécurité nationale avec Wendell Nii Laryea Adjetey

Le 16 février 2023, le Centre mondial du pluralisme a célébré le lancement du dernier ouvrage de M. Wendell Nii Laryea Adjetey, Ph. D., Cross-Border Cosmopolitans: The Making of Pan-African North America, en collaboration avec la Fondation Inspirit. Le livre de M. Adjetey examine de manière critique l’histoire de la diaspora africaine en Amérique du Nord et, ce faisant, nous encourage à dépasser nos définitions actuelles de la communauté et des relations.

La secrétaire générale du Centre, Meredith Preston McGhie, s’est entretenue avec M. Adjetey sur l’importance de la solidarité et de l’activisme des Noirs au-delà des frontières nationales. Ils ont discuté de la manière dont cette solidarité a contribué à modifier les relations de pouvoir établies. Ce changement de pouvoir, comme le note M. Adjetey, « a la capacité de nous aider à guérir nos blessures, sans quoi il nous serait extrêmement difficile de consolider nos assises pluralistes ».

Les blessures auxquelles M. Adjetey fait référence sont les notions anti-Noirs qui perpétuent des idées fausses nuisibles, en particulier en ce qui concerne la violence des « gangs » et l’augmentation du nombre d’incarcérations. Dans le cadre de son travail de développement communautaire dans le nord de Toronto, M. Adjetey a reconnu l’importance de remettre en question l’image dominante de la vie des Noirs. Il a commencé à explorer comment et pourquoi les Noirs de diverses nationalités, origines et traditions religieuses et culturelles se sont historiquement rassemblés pour imaginer un panafricanisme qui atténue les effets du racisme anti-Noirs. Ici, le panafricanisme fait référence à une « solidarité fondée sur la conscience raciale noire, la mobilisation sociale contre l’exploitation et la domination, et le contrôle des ressources communautaires ».

Adoptant une approche continentale, M. Adjetey étudie le panafricanisme dans une perspective canadienne, américaine et caribéenne, laquelle est souvent négligée. L’un des principaux enseignements du travail de M. Adjetey est qu’il existe, indépendamment du genre ou de la classe sociale, une forte solidarité transnationale enracinée dans une expérience noire commune. Qui plus est, cette solidarité, fondée sur le respect mutuel, est renforcée par sa diversité et les différences intraraciales. Ainsi, de nombreuses communautés noires font preuve d’une éthique cosmopolite qui leur permet de rester locales tout en agissant à l’échelle mondiale.

Adjetey note que cet état d’esprit est déterminant dans la poursuite de la justice et de la libération raciales. D’un point de vue historique, cela renvoie à la manière dont les Noirs d’Amérique du Nord ont franchi les frontières pour définir leurs propres conditions de citoyenneté. Adjetey raconte notamment comment Juanita DeShield, la première femme noire diplômée du Collège McGill dans les années 1930, s’est engagée auprès des communautés noires à Harlem, dans l’État de New York, pour réclamer un meilleur traitement pour les personnes d’ascendance africaine. Des récits comme celui-ci mettent en lumière le développement d’une communauté transnationale qui s’est avérée cruciale pour faire face aux difficultés partagées.

Une difficulté particulièrement importante à surmonter a été la mission commune des États-Unis et du Canada de saper le droit à l’autodétermination des Noirs. Cet effort a été mené par les agences de sécurité nationale dans le cadre d’une contre-insurrection sanctionnée par l’État, qu’il documente rigoureusement dans son livre. Pourtant, le gouvernement canadien a réussi à éviter de lourdes critiques pour ses pratiques discriminatoires parce qu’il a dénoncé le racisme au sein du Commonwealth britannique et aux États-Unis, se faisant ainsi le défenseur des peuples non blancs. Pourtant, cette image doit être nuancée pour rendre fidèlement compte de la relation du Canada avec ses groupes racialisés.

En conclusion, M. Adjetey nous rappelle que le Canada, à la recherche d’une réputation humanitaire, a tendance à s’opposer aux États-Unis divisés sur le plan racial pour minimiser ses propres racines coloniales – ce qu’il appelle le mythe du progressisme canadien. M. Adjetey souligne qu’il s’agit d’un mythe puisque le Canada, à l’instar des États-Unis, a mis en place des politiques d’immigration anti-Noirs et a saboté les efforts de libération des Noirs.

En outre, ce mythe empêche toute discussion sur la dépossession des Autochtones et le mauvais traitement des immigrants par le Canada tout au long du vingtième siècle. Ce mythe nous empêche également de reconnaître que les personnes en marge de la société sont souvent celles qui ont le plus d’influence sur la définition des contours de la citoyenneté et sur le façonnement de l’identité canadienne. Le travail de M. Adjetey illustre le fait que les personnes racialisées ont tout intérêt à faire pression en faveur d’une société plus pluraliste qui intègre activement les voix marginalisées et cherche à réparer les erreurs historiques.

Regardez la vidéo de l’événement. 

CONFÉRENCIER :

Wendell Nii Laryea Adjetey

(Nii Laryea Osabu I, Oblantai Mantsè, Atrékor Wé), Chaire William Dawson, est professeur adjoint et spécialiste de l’histoire américaine de postreconstruction et de l’histoire de la diaspora africaine en Amérique du Nord et dans le monde atlantique à l’Université McGill. Il est l’auteur de Cross-Border Cosmopolitans: The Making of a Pan-African North America (2023, UNC Press).

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